La question du dépistage de stupéfiants en entreprise est particulièrement épineuse.

Elle rend perméable la frontière entre le droit au respect de la vie privée et la bonne conduite dans le milieu de l’entreprise.

Pourtant, ce dépistage permet de lutter efficacement contre les risques d’accident au travail notamment puisqu’il concerne plus d’une entreprise sur dix.

De surcroît, les employeurs sont tenus, en matière de protection de la santé et de la sécurité de leurs salariés, d’une obligation de résultat dont ils doivent assurer l’effectivité.

Pour l’heure, il n’existe aucune disposition dans le Code du Travail relative à l’usage de stupéfiant, c’est donc les Juges qui se sont penchés sur la question.

Le Tribunal Administratif de Nîmes a considéré que le test salivaire n’était pas un acte de biologie médicale au sens de l’Article 6211-1 du Code de la Santé Publique. (T.A de Nîmes n° 1201512 du 27 mars 2014).

Dans ces conditions, l’Employeur peut réaliser un test salivaire pour dépister les salariés sous l’emprise de drogues mais seulement sous certaines conditions cumulatives ; le dépistage systématique étant prohibé.

En effet, le recours au test salivaire n’est possible que si :

– Le règlement intérieur en prévoit la possibilité,

– Le poste occupé par le collaborateur suspect doit impliquer un risque sur la santé (manipulations d’instruments dangereux, conduite d’engins, etc…),

– Le salarié doit avoir la possibilité de contester le test salivaire par un autre test ou une contre-expertise,

– Le personnel amené à pratiquer le test salivaire doit être formé à son utilisation.

Selon la Direction Générale du Travail (DGT), le test de dépistage salivaire ne peut jamais entraîner une sanction car la contre-expertise est faite sous le sceau du secret médical.
La finalité du test de dépistage salivaire a, pour l’heure, une visée uniquement préventive et non répressive.
En effet, l’employeur ne peut pas sanctionner le salarié dont le test salivaire se révèle positif car l’interprétation des résultats et des suites à donner en termes d’aptitude appartient au médecin du travail, dont les préconisations s’imposent à l’employeur.

L’employeur peut cependant, comme le salarié, contester les avis d’aptitude du médecin du travail devant l’inspecteur du travail (Article L. 4624-1 du Code du travail).

En d’autres termes, un test positif ne suffit pas à justifier un licenciement, puisqu’il s’agirait d’une sanction prise sur le seul motif de la consommation de drogues illicites qui peut avoir eu lieu en dehors des temps et lieu de travail, ce qui constituerait une ingérence dans la vie personnelle.

Toutefois selon la DGT, l’employeur peut sanctionner un salarié ayant consommé une drogue illicite, des lors que le risque a été identifié et que le plan de prévention et les mesures d’accompagnement individuel ont été mis en œuvre.

• Illustrations Jurisprudentielles :

Le licenciement d’un salarié qui s’est vu retirer son permis de conduire pour conduite sous l’emprise d’une drogue en dehors du temps de travail est sans cause réelle et sérieuse si la conduite d’un véhicule ne constitue pas l’un des éléments de sa fonction (Cass. soc., 4 mai 2011, n° 09-43.192 ; CA Paris, 11 sept. 2012, n° 10/09919).

En revanche, l’employeur peut sanctionner un salarié ayant consommé une drogue illicite, dès lors que le salarié occupe un poste à risque, peu important que la drogue ait été consommée en dehors du temps de travail (Cass. soc., 27 mars 2012, n° 10-19.915).

En l’espèce, un salarié appartenant au personnel navigant commercial d’une compagnie aérienne avait fumé pendant un temps d’escale entre deux vols longs courriers.

La faute grave a pu être retenue, s’agissant d’un « personnel critique pour la sécurité » se trouvant sous l’influence de produits stupéfiants pendant l’exercice de ses fonctions, l’employeur a pu légitimement estimer qu’il n’avait pas respecté les obligations prévues par son contrat de travail et avait ainsi fait courir un risque aux passagers, ce qui constituait une faute grave justifiant la rupture immédiate de son contrat de travail.

La Cour de cassation a également admis le licenciement pour faute grave de deux salariés qui fumaient du cannabis durant leur pause (Cass.Soc. 1er juillet 2008, n°07-40053 et 07-40054).